Mots-Clés : correspondance
Transcription
Université de Poitiers
Faculté des lettres
Poitiers, le 6 novembre 1899
Cher et Révérend Père,
Le doyen de la faculté des lettres en train de surveiller 115 candidats et de compter tous ceux pour lesquels on sollicite son indulgence, c'est là un tableau qui n'est pas fait pour vous surprendre. Mais je profite de l'occasion pour vous solliciter vous même, ceci est un peu plus étrange. Je ne veux pas cependant me refuser à le faire, celui qui m'en prie ayant des titres sérieux à ma bienveillance. C'est d'ailleurs par lui que j'apprends votre adresse alors que depuis trois semaines, je guettai votre silhouette sur les rues et les places de Poitiers, sans être trop étonné de ne pas vous y apercevoir.
Voici ce dont il s'agit : un des commis de notre secré
Saut de page
taires, M. Selmes, homme de 42 ans, un peu las de marquer le pas dans une situation non pas seulement modeste mais sans avenir, croit pouvoir en sortir par un poste d'agent d'assurances de la compagnie du Phénix, poste devenu vacant à Poitiers. C'est un brave garçon, solide au physique, intelligent et débrouillard, marié à une femme très digne qui exerce sur lui une heureuse influence et tout à fait en mesure de travailler avec succès à conserver et à grossir dans notre région, qu'il connait bien, un portefeuille d'assurances. Son sort, dit-on, est entre les mains de M. de Lassat, inspecteur au Phenix et habitant ici la rue des Carmélites. Si j'avais l'honneur de connaitre personnellement M. de Lassat, j'aurais plaidé par moi-même la cause de mon protégé ; je crois cependant que même dans ce cas, un mot venant de vous aurait plus d'influence. Si vous n'y voyez pas d'inconvénient, c'est ce mot que je me permets de vous demander ; au cas où mon importunité aurait besoin, pour être pardonnée, de quelque circonstance atténuante,
Saut de page
je vous renverrais à un de vos Pères qui, étant le confesseur de Mr Selmes, a lui-même indiqué le moyen d'arriver à M. de Lassat : vous voyez le reste de la filière ; et je ris en pensant quel bel article nous fournirions tous deux à une certaine presse sur l'influence de ces affreux Jésuites qui trouvent le moyen d'être utiles aux braves gens et d'avoir des amis partout pour cela.
Il me tarde de vous revoir à Poitiers ; il est probable que vous rapporterez une ample moisson de St Maur malgré les belles gerbes que vous y avez déjà coupées. Je viens de passer un mois en tête à tête avec les dieux lares ; j'ai expédié tout à l'heure mon manuscrit qui m'a donné un mal énorme et dont le départ est pour moi une vraie délivrance. Pour me reposer j'ai un millier de candidats sur les bras et ceux là sont plus embêtants (pardon !) encore que les dieux lares.
Recevez mon cher et Révérend Père, l'expression de mes sentiments d'affection et de respect
J.A. Hild
- Sujet
- correspondance
- Créateur
- Hild, Joseph-Antoine (1845-1914)
- Source
- FRAD86_16J3_41
- Format
- 21 cm x 14 cm
- 3 p.
- Identifiant
- FRAD86_16J3_41_065
- Destinataire
- De La Croix, Camille (1831-1911)
- Transcripteur
- Corinnelamour